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dimanche 4 octobre 2009

1685 L'exil de la famille de Caille

A Manosque, petite ville de l'ancienne Provence, aujourd'hui chef-lieu de canton du département des Basses-Alpes, vivait vers 1660 un certain Scipion le Brun de Castellane, seigneur de Caille et de Rougon. Il avait, en 1655, épousé demoiselle Judith le Gouche, d'une bonne famille de robe. Les deux époux professaient la religion calviniste, ou, comme on disait alors, prétendue réformée. En 1685, Louis XIV ayant révoqué le célèbre édit de 1598, dit "Edit de Nantes", qui accordait aux protestants la tolérance et des places de sûreté, le Brun de Castellane quitta la France comme firent tant d'autres malheureux que chassait de leurs foyers l'intolérance catholique. La famille exilée se composait de cinq personnes : le Brun de Castellane, sieur de Caille, sa mère, son fils et deux filles. Depuis six ans Judith le Gouche était morte, ainsi que deux de ses fils décédés en bas âge, l'aîné seul, Isaac, survivait, et avait vingt et un ans au moment où il quitta la France. Un ministre de la religion, Bernard, précepteur du fils de Caille, accompagnait la famille ainsi que plusieurs domestiques. Les de Caille allèrent s'établir à Lausanne, petite ville de la Suisse bernoise. Au mois de décembre 1689, Louis XIV compléta son œuvre d'intolérance par un édit de spoliation, qui attribuait aux parents les plus proches les biens des calvinistes émigrés. A cette époque la famille de Caille ne se composait plus que de quatre personnes, une des filles étant morte en 1686. Quelques mois après l'édit de spoliation l'aïeule mourut à son tour. Parmi les parents des de Caille restés en Provence et qui avaient préféré l'abjuration à l'exil, quatre se présentèrent pour se disputer les dépouilles de leurs proches : c'étaient la dame Rolland, née Anne le Gouche, propre sœur de la dame de Caille et épouse d'un sieur Rolland, avocat général au Parlement du Dauphiné, une dame Tardivi, parente du sieur de Caille, femme d'un conseiller du roi au siège de Grasse, un sieur Jean Pousset de Cadenet, un sieur de Muges. Ce dernier se prétendait substitué par un fidéi commis aux droits des émigrés.
Un arrêt du parlement de Provence, en date du 30 juin 1690, débouta de Muges, adjugea à la dame Tardivi pour la plus grande part, et à Pousset pour le reste, les biens paternels qui montaient à douze mille livres de rente environ et saisit la dame Rolland des biens maternels évalués à deux mille cinq cents livres de rente.







Le 15 février 1696, Isaac de Caille, sieur de Rougon, le dernier des fils de le Brun de Castellane, mourut à Vevey d'une maladie de langueur. Le malheureux père, après avoir vu s'éteindre dans ses bras ce dernier espoir de son nom, informa de ce nouveau malheur ses parents de Provence. La dame Rolland qui, espérant pour son neveu des temps meilleurs, lui conservait sa petite fortune, en disposa sur cette nouvelle en faveur des pauvres de la Charité de Manosque. La donation entre vifs à la date du 5 décembre 1698, qui gratifiait cette communauté de la maison du sieur de Caille et d'un domaine de 800 livres de rente, donnait comme motif de cette gratification la mort du sieur de Caille de Rougon.