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lundi 27 juin 2011

1312 Un miracle de sainte Marie-Madeleine en Provence

Jean Gobi l'Ancien, prieur de Saint-Maximin de 1304 à son décès, survenu en 1328, rédigea le "Liber Miraculorum B. Mariae Magdalenae". Voici le miracle 31, dont vous comprendrez pourquoi il fut choisi ici.

"L'an du Seigneur 1310, une fluxion à la tête fit si violemment souffrir un habitant d'Albenga, du nom de Perceval, qu'elle le priva de la vue en peu de jours; ce fut au point qu'il en resta aveugle pendant presque deux ans, comme il l'affirma sous serment. Ayant constaté que ni les conseils de différents médecins du corps, ni les remèdes qu'ils lui appliquaient ne le soulageaient, il en conclut qu'il fallait plutôt faire appel à l'aide des médecins spirituels, c'est-à-dire des saints.

Il savait que sainte Marie-Madeleine, qui la première de tous les mortels, a vu le Christ après sa résurrection, pouvait avec celui-ci l'aider à recouvrer la vue du corps, grâce à laquelle il serait capable de regarder et de distinguer les choses matérielles comme avant. C'est pourquoi il décida d'aller à Saint-Maximin, où le corps de cette sainte est inhumé, visiter son sanctuaire.

Il vint dans cette ville avec son guide appelé Étienne, de Saint-Martin de la Brasque ; il enleva ses vêtements jusqu'à la chemise avant d'entrer dans l'église ; il tira même ses chausses de façon à dénuder ses genoux ; en pleurant, il commença alors à pénétrer dans l'église sur ses genoux nus. Et pour pouvoir provoquer plus vite la clémence divine à avoir pitié de lui, il se frappait avec une grande courroie, qu'il portait auparavant comme ceinture, et aussi avec le fermoir en fer, qui pendait à son bout. Il se frappait si énergiquement que presque à chaque coup, en fouettant son dos jusqu'au sang, il tâchait sa chemise ; et il continua même cette flagellation au point de briser ce fermoir.
Dans cette posture, il errait à travers l'église en allant comme quelqu’un qui ne voyait absolument rien ; alors les frères présents, qui observaient la scène en le plaignant, se mirent à le guider vers l'autel, sur lequel le corps de cette sainte est conservé avec vénération dans une châsse. Conduit à cet autel, il s'avançait, dans la tenue décrite ; quand il crut être déjà à proximité des lieux où sont les reliques de Marie-Madeleine, ouvrant les yeux, avec une grande dévotion et une espérance inébranlable, il se mit à crier : " Je vois tout ! Je vois tout ! Sainte Marie-Madeleine m'a rendu la vue ! "

Les frères, présents dans l'église, qui l'avaient vu auparavant aveugle, et qui imploraient pour lui la miséricorde divine, accoururent.  Ils furent convaincus du fait. En effet, comme ils lui présentaient divers objets, en lui demandant pour chaque chose qu'on lui montrait ce que c'était, ils les reconnaissaient toutes véritablement, et les nommaient immédiatement. Devant un miracle si évident et manifeste, les frères s'assemblèrent donc avec le peuple de cette ville ; ils glorifièrent tous ensemble le Seigneur dans sa sainte, Madeleine, et renvoyèrent dans son pays avec allégresse cet homme guéri et voyant.

Extrait de : Jean Gobi l'Ancien, Miracles de sainte Marie-Madeleine, Introduction et traduction de Jacqueline Sclafer - "Lire le moyen Age" _ IRHT _ CNRS éditions